Indemniser un préjudice d’anxiété revient à indemniser un préjudice né de la peur qu’un risque se réalise.
Le juge ne reconnait que très rarement la réalité de ce préjudice.
Ainsi, en matière médicale, la crainte de développer une pathologie suite à la prise d’un médicament (médiator, pilule type Diane 35 etc…) n’est pour l’heure pas indemnisée par le juge. Du reste, et s’agissant du Médiator, l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) a très rapidement précisé, suite à la création du fonds d’indemnisation des victimes du Médiator, que le préjudice d’angoisse ou d’anxiété ne serait pas indemnisé (ce qui n’empêche de saisir le juge du chef de ce préjudice).
On note cependant une décision de la Cour de cassation (civ 1ère – 9 juillet 1996 – n° 94-12868) dont la première chambre a indemnisé le préjudice d’anxiété d’une victime, ayant été transfusée, et contracté par la suite le virus de l’hépatite C
«Attendu qu’il est encore fait grief à la cour d’appel d’avoir réparé un préjudice hypothétique ;
Mais attendu qu’après avoir énoncé que, selon l’avis de l’expert, l’hépatite paraissait » paisible » pour l’instant, mais que l’évolution de cette affection pouvait être sournoise, M. X… devant se soumettre à une surveillance stricte et régulière, l’arrêt attaqué retient que l’anxiété résultant de cette mesure et la nécessité d’une surveillance médicale devaient être indemnisée par l’allocation d’une somme de 50 000 francs ; que la cour d’appel, en prononçant cette condamnation à titre d’indemnisation de la contamination par le virus de l’hépatite C, a justifié sa décision».
En l’espèce si la Cour de Cassation a admis l’indemnisation du préjudice d’anxiété, ça n’est qu’a posteriori, c’est à dire une fois la maladie déclarée.
En matière d’amiante, le juge est plus généreux.
C’est ainsi que dès 2010, le juge reconnait l’existence d’un préjudice d’anxiété aux salariés qui ont travaillé dans des entreprises fabriquant ou manipulant de l’amiante et qui ouvrent droit à la pré-retraite amiante.
En effet, dès 2010 ( cass soc 11 mai 2010 – n° 09-42.241), la Cour de cassation a jugé que
«la Cour d’appel a relevé que les salariés, qui avaient travaillé dans un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi de 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante, se trouvaient par le fait de l’employeur dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante et étaient amenés à subir des contrôles et examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ; qu’elle a ainsi caractérisé l’existence d’un préjudice spécifique d’anxiété et légalement justifié sa décision;»
En l’état actuel de la jurisprudence, pour bénéficier d’une indemnisation de ce poste de préjudice, il incombe de prouver que vous avez été exposé à l’amiante et avez travaillé dans une entreprise figurant sur une liste établie par arrêté.
Cette position du juge s’explique notamment par le fait que les maladies inhérentes à une exposition directe à l’amiante sont graves, que la plupart du temps les salariés exposés ont, ou ont eu dans leur entourage des collègues malades, et connaissent par conséquent les souffrances terribles liées à ces pathologies.
Par trois arrêts Cass. soc. 25 sept. 2013, n° 12-20157, n°12-12883, n°12-20912, la Cour de cassation, tout en refusant de consacrer un nouveau poste de préjudice ( bouleversement dans les conditions d’existence), intègre dans le préjudice d’anxiété, le bouleversement dans les conditions d’existence ainsi que l’ensemble des conséquences du trouble psychologique.
Récemment ( Cass soc 2 avril 2014 – n° 12-29825), la Cour de cassation a confirmé l’indemnisation accordée au titre du préjudice d’anxiété à un salarié relevant de la pré-retraite amiante, lequel répare «l’ensemble des troubles psychologiques y compris ceux liés au bouleversement dans les conditions d’existence résultant du risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante».
Votre avocat, Valérie GUINCHARD-TONNERRE, diplômée en droit du dommage corporel s’attachera donc à faire valoir ce préjudice d’anxiété devant le juge, et à en obtenir une juste indemnisation.